Prix de l’électricité : pour y voir plus clair

Le site vie-publique.fr publie un intéressant article pour y voir plus clair sur les tarifs de l’électricité en France. Nous en reproduisons ci-dessous un abstract au moment où les mesures adoptées en 2022 vont prendre fin, impactant collectivités et consommateurs privés (+15% annoncés ce jour par la Première Ministre).

Le bouclier tarifaire sur l’énergie prévu dans la loi de finances 2022 puis prolongé jusqu’au 31 décembre 2022 a limité la hausse du prix réglementé de l’électricité à 4% et a gelé le tarif réglementé du gaz à son niveau d’octobre 2021. Pour y parvenir, le gouvernement a notamment baissé la contribution au service public de l’électricité (CSPE), ex-taxe intérieure de l’électricité (TICFE).

Prix réglementé, prix fixe : quelle différence ?

Depuis l’ouverture à la concurrence, les consommateurs peuvent choisir plusieurs tarifs d’électricité :
– tarif réglementé (“tarif bleu” d’EDF) fixé par les pouvoirs publics et proposé par les fournisseurs historiques.
– tarif fixe et identique pendant toute la durée du contrat ;
– tarif indexé qui suit l’évolution des prix réglementés ;
– prix du marché qui peut changer en cours de contrat selon l’évolution du prix du marché de gros.
Les particuliers peuvent revenir à tout moment à un contrat au tarif réglementé.

Pourquoi le prix de l’électricité augmente-t-il ?

Le prix de l’électricité dépend de plusieurs facteurs :
• les coûts de production, de stockage, d’approvisionnement et de commercialisation
• les coûts d’acheminement
• les taxes telles que la contribution au service public de l’électricité (CSPE), la contribution tarifaire d’acheminement (CTA), la taxe sur la valeur ajoutée (TVA)
• le prix du gaz (une partie de l’électricité produite et importée provient de centrales à gaz)
• le coût des quotas de CO2.

Plus précisément, la hausse du prix de l’électricité en 2022 est liée à plusieurs facteurs :
• augmentation du prix du gaz et risque d’un arrêt des importations de gaz russe
• production réduite d’énergie nucléaire (arrêt de réacteurs après la découverte de corrosion, calendrier des maintenances retardé par la crise sanitaire)

Comme la production s’ajuste à chaque instant à la demande, le prix de l’électricité est déterminé par les coûts de la dernière centrale appelée pour assurer l’équilibre entre l’offre et la demande dans un contexte de forte reprise de la consommation post-Covid. De 50 euros/MWh début 2021, le prix de gros est passé à 222 euros/MWh fin 2021 et même jusqu’à 700 euros dans le courant de l’été dernier. Ces évolutions ont évidemment une répercussion sur la facture finale des consommateurs. Le “bouclier tarifaire 2022” a visé à limiter la hausse de la facture à 38 euros/an pour un particulier et à environ 60 euros/an pour un professionnel. C’est ce dispositif de modération qui est modifié à compter du 1er janvier 2023.

Quel est l’impact des quotas de CO2 sur le prix de l’électricité ?

En Europe, les producteurs d’énergie doivent acheter des droits d’émission en CO2 pour avoir le droit d’en émettre sur le marché d’échanges de quotas d’émission. Plus la production d’électricité émet du CO2, plus la centrale doit acheter des quotas. Certaines centrales françaises, qui produisent de l’électricité “en renfort” pour faire face aux besoins ponctuels (en hiver par exemple), fonctionnent au charbon ou au gaz. Quand le prix du quota d’émissions de CO2 augmente (il a été multiplié par 2,4 en 2021), celui de l’électricité aussi.

Comment fonctionne le marché de l’électricité ?

En France, l’électricité provient très majoritairement des centrales nucléaires de production et des importations en provenance d’autres pays européens. L’électricité est achetée à des pays voisins, essentiellement l’Allemagne, quand elle est moins chère et en cas de panne ou de maintenance des centrales ou de hausse des besoins intérieurs.

Avant d’être proposée aux particuliers et aux entreprises, l’électricité est vendue et achetée sur le marché de gros. Les prix de référence pour le marché français sont basés sur des calculs complexes réalisés par les opérateurs du marché et sont fixés tous les jours par des enchères communes. Les fournisseurs historiques (EDF) ou alternatifs proposent ensuite des contrats au consommateur final selon différents tarifs : tarifs réglementés, tarifs fixes etc.

Depuis quand l’électricité est-elle ouverte à la concurrence en France ?

L’ouverture à la concurrence du marché européen de l’électricité, débuté en 1996, a débuté en France en 1999 pour les entreprises et 2007 pour les particuliers. Il s’agissait de construire un unique marché intérieur de l’énergie caractérisé par :
• un libre choix du fournisseur pour les consommateurs
• une liberté d’installation pour les producteurs d’électricité
• le droit d’accès à tous les réseaux pour tous les utilisateurs des réseaux (lignes électriques et réseaux de gaz).

Pourquoi EDF vend-elle de l’électricité à ses concurrents ?

Depuis la loi NOME (Nouvelle organisation du marché de l’électricité) de 2010, EDF doit vendre un quart de sa production d’électricité aux fournisseurs qui n’en produisent pas. Le prix est de 42 euros/MWh. Au-delà de ce plafond, les concurrents doivent se fournir sur le marché.

Avant 2011, les fournisseurs dit alternatifs se fournissaient aux prix du marché, très fluctuants, et la production nucléaire française était réservée à EDF. Depuis cette date, les concurrents d’EDF peuvent accéder au marché de l’électricité nucléaire et ce jusqu’en 2025. Le gouvernement a demandé à EDF d’augmenter la quantité d’électricité vendue à bas prix aux autres fournisseurs au 1er avril 2022 sous réserve pour ceux-ci de respecter des obligations de service public en contrepartie. Les marchés français de l’Electricité et du Gaz font l’objet d’un contrôle et d’une surveillance de la part de de la Commission de régulation de l’énergie (CRE). C’est elle qui, deux fois par an, propose une révision du tarif réglementé de l’électricité (TRVE), dit “tarif bleu” d’EDF, qui concerne la majorité des foyers.

Pour 2022, les montants proposés, qui reflètent la hausse des prix de gros de l’électricité, s’élèvent à :
• + 44,5% HT (+ 57,22 euros/MWh HT), pour les tarifs bleus applicables aux particuliers ;
• + 44,7% HT (+ 59,22 euros/MWh HT), pour les tarifs bleus applicables à certains professionnels.

Bernard LUSSET